Pour être honnête même en étant un fervent partisan du ferroviaire je suis très sceptique qu'une exploitation sans subventions puisse être financièrement tenable sur le moyen terme, surtout pour une petite structure sans effet de réseau, visibilité marketing ni trésorerie solide. Locomore -qui en Allemagne s'était lancé sur un corridor autrement plus peuplé- à coulé au bout de six mois et les circulations n'ont repris que lorsqu'elles ont pu être adossées à une grosse boîte comme Flixtrain.
Si l'on regarde en termes de potentiel commercial, le serpent de charge sera assez hétérogène :
- Je vois un potentiel conséquent sur Limoges-Bordeaux, notamment pour les étudiants (probablement qu'il faudra fortement alléger l'offre du lundi au jeudi) et plus globalement car en temps que capitale régionale Bordeaux est le grand pôle d'attractivité du sud-ouest.
- Par contre le centre de la ligne va être handicapé par la faible densité de population et l'absence de grands pôles relais (Guéret 15 khab et Montlucon agglo 62 khab) susceptibles de générer d'importants flux de cabotage. En fait il manque un Clermont-Ferrand pour recharger...
- A l'est il y a du potentiel sur Roanne-Lyon mais 1) pas sûrs qu'ils puissent le vendre, pour du compte propre l'ouverture à la concurrence prévoit un test d'impact par l'ART et 2) Roanne étant surtout tournée vers Lyon elle ne remédiera pas ou peu au tiret précédent.
-Sur les trajets Lyon-Bordeaux de bout en bout (même si je sais que ce n'est pas la cible principale), le temps de parcours ne sera probablement pas vraiment meilleur que celui proposé par les cars longue distance (7h30) et il ne faut pas oublier Easyjet et AirFrance qui sont tous les deux sur la liaison.
Cet axe a une véritable pertinence en termes d'aménagement du territoire (
même si dans un monde idéal il vaudrait mieux rouvrir Eygurande-Laqueuille pour avoir Clermont comme relais de croissance) mais j'ai des doutes que les volumes suffisent pour amortir une exploitation à risques et périls comme c'est le cas ici. Donc sans assistance de la collectivité ca me semble compliqué. A défaut d'un accord Nlle Aquitaine/Aura pour un conventionnement de bout en bout, il pourrait y avoir deux solutions de compromis intelligentes mais juridiquement complexes :
- une convention tarifaire avec compensation de recettes sur la section Bordeaux-Limoges voire Bordeaux-Montlucon comme cela s'est fait entre la région PACA et Thello pour les abonnés. Cela peut revenir à une subvention d'exploitation déguisée (mais dans des proportions limitées)
- si Bordeaux-Limoges est un jour mis en appel d'offres, Railcoop pourrait se porter candidat en intégrant dans sa proposition un prolongement à risques et périls au delà de Limoges/Montlucon jusqu'à Lyon, ce qui lui permettrait au moins sur un tiers des kilomètres d'être financièrement assisté. C'est ce que fait la DB en Allemagne sur quelques axes, permettant à des lignes qui n'avaient plus que du trafic régional de retrouver des connections grandes lignes. Exemple le Regionalexpress (conventionné) Trier-Koblenz qui une ou deux fois par jour (j'ai un doute) est prolongé à risques et périls sous le régime Intercity jusque Cologne/Düsseldorf.
Bref je leur souhaite le meilleur en termes de réussite mais ne suis pas très optimiste...