LGV Poitiers-Limoges : les habitants ont la parole
L’enquête publique sur le projet de barreau ferroviaire débute aujourd’hui. Opposants et partisans ont jusqu’au 13 juillet pour faire valoir leurs arguments.Depuis neuf ans qu'il est question de ce projet, tout a été dit et tout a été écrit sur la ligne ferroviaire à grande vitesse Poitiers-Limoges. Durant quarante-quatre jours, les partisans et les opposants vont tout de même avoir l'occasion de faire valoir très officiellement leurs arguments auprès du commissaire enquêteur chargé d'émettre un avis favorable ou défavorable à la déclaration d'utilité publique.
Ils vont aussi pouvoir consulter l'intégralité du dossier préparé par Réseau Ferré de France : « Un gros pavé de cinq mille pages qui comprend le rapport rendu par l'Autorité environnementale en mars dernier et le mémoire complémentaire du maître d'ouvrage », précise Marie-Paule Hennuyer, la représentante de RFF en Limousin.
" On va momifier le territoire "Les opposants qui demandent depuis longtemps à prendre connaissance du volet socio-économique ne manqueront pas de le consulter. Pour le reste, ils savent déjà les remarques qu'ils formuleront ; de l'empreinte carbone négative pour les cinquante prochaines années aux risques d'inondations accrus dans la vallée du Clain en passant par l'incompatibilité avec les engagements pris par l'État sur la ligne Paris-Toulouse.
« Nous sommes effarés par la précipitation des événements », insiste Nicolas Bourmeyster, le président du collectif Non à la LGV. « Comme il n'y aura pas d'argent pour financer ce projet avant au moins quinze ans, on va momifier le territoire, les maisons y seront invendables, les gens vont hésiter à s'y installer… »
Il s'étonne surtout que le gouvernement engage cette démarche dès maintenant alors que la commission Mobilité 21 chargée de hiérarchiser les projets d'infrastructures de transport doit rendre son rapport (peu favorable aux lignes à grande vitesse) en juin.
C'est que ce projet est soutenu en haut lieu. Le président (corrézien) de la République qui suit personnellement le dossier a d'ailleurs récemment nommé un ancien camarade de promotion de l'ENA, Michel Jau, à la tête de la préfecture de la Haute-Vienne. « C'est un projet validé. Je ne pense pas qu'il soit de nature à être remis en cause », a déclaré le représentant de l'État qui a évoqué une « décision irréversible » en prenant ses fonctions.
En Limousin, les élus espèrent toujours pouvoir prendre le TGV dès 2020.
les dates-clés> 2004 : le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, abandonne le projet Paris - Orléans - Limoges - Toulouse et lance les études pour la LGV Poitiers-Limoges pour une mise en service en 2014.
> 2006 : un débat public est organisé dans douze villes en Poitou-Charentes et Limousin.
> 2007 : Réseau Ferré de France retient l'option du tracé central, le plus direct, passant à proximité de Montmorillon ; une convention de financement des études (30 M€) est signée entre RFF, l'État et les collectivités.
> 2012 : la commission nationale du débat public décide qu'il n'y a pas lieu d'organiser de nouveau débat public malgré l'expiration du délai de cinq ans avant l'ouverture de l'enquête publique.
> 2013 : le gouvernement donne son feu vert au lancement de l'enquête publique sans attendre le rapport Mobilité 21.
pratiqueL'enquête publique se déroulera du jeudi 30 mai au vendredi 12 juillet 2013 inclus, durant 44 jours. Dans la Vienne, le public pourra consulter le dossier d'enquête publique et présenter ses observations à la préfecture de Poitiers et à la sous-préfecture de Montmorillon, mais aussi dans les mairies des dix-neuf communes concernées par le tracé : Aslonnes, Civaux, Dienné, Fleuré, Gizay, Gouëx, Iteuil, Lathus-Saint-Rémy, Lhommaizé, Lassay-les-Châteaux, Mazerolles, Moulismes, Persac, Plaisance, Les Roches-Prémarie-Andillé, Vernon, La Villedieu-du-Clain et Vivonne. Le dossier de l'enquête doit également être consultable sur le site Internet de la préfecture de la Vienne :
http://www.vienne.pref.gouv.fr.
Collectif des opposants :
http://non-lgv-poitiers-limoges.frAssociation de promotion de la LGV :
http://tgv-plb.asso.frpour> Alain Claeys
Le député-maire PS de Poitiers est le principal avocat de la LGV Poitiers-Limoges dans la région. Il souhaite placer la gare multimodale de Poitiers au cœur d'un nœud ferroviaire dans la perspective d'une poursuite de la ligne à l'Est jusqu'à Lyon.
> Catherine Coutelle
La députée PS de la 2e circonscription de la Vienne défend le projet avec une réserve sur le financement. « Il ne me semble plus possible d'imaginer que ces infrastructures particulièrement coûteuses soient financées par l'État et les collectivités territoriales, seuls », écrivait-elle l'an dernier.
indécis> Ségolène Royal
Après avoir longtemps affiché son scepticisme, la présidente PS de Poitou-Charentes a changé de stratégie en début d'année : la Région est à présent officiellement favorable au projet mais elle ne veut pas le financer, comme pour la ligne Tours-Bordeaux. « Le projet actuel de RFF n'a pas encore démontré sa pertinence sur le plan de sa rentabilité économique », écrivait-elle en 2009. « La Région soutient ce projet essentiel pour le Limousin », précise-t-elle maintenant.
> Jean-Pierre Raffarin
L'ancien Premier ministre qui a lui-même mis le projet sur les rails il y a neuf ans fait désormais campagne contre la LGV Poitiers-Limoges mais sans le dire franchement. A un peu plus d'un an des sénatoriales, il conditionne son soutien à la construction très hypothétique d'une gare dans le Montmorillonnais : « Ou on a une gare et la LGV a un sens ou on n'a pas de gare et le développement du TER peut résoudre la question… »
contre> Jean-Michel Clément
Le député PS de la troisième circonscription (Sud Vienne) plaide depuis longtemps pour un abandon du projet : « Les territoires ruraux sont oubliés pour ne pas dire sacrifiés. Par ailleurs, le temps gagné ne serait pas énorme, et disproportionné, par rapport au coût », expliquait-il l'an dernier.
> Yves Bouloux
Le maire DVD de Montmorillon et président de la communauté de communes du Montmorillonnais s'oppose à la LGV défend le projet de mise à 2X2 voies de la RN 147 entre Poitiers et Limoges.
> Robert Rochaud
Le porte-parole des élus écologistes de Poitou-Charentes précise que les Verts ne sont « pas opposés par principe au TGV » : « L'urgence, ce n'est pas la LGV Poitiers-Limoges. L'urgence est de moderniser la ligne Poitiers-Limoges. »