par chris2002 » 06 Sep 2020 7:47
Un RER n'a pas forcément besoin de relation diamétrale. Certes à Paris les "RER" sont diamétraux, mais si on compare avec d'autres réseaux, il faudrait aussi considérer toutes les lignes Transilien comme des lignes "RER", ne l'oublions pas.
Par exemple à Zurich, aujourd'hui la majorité des lignes ont été diamétralisées via un des deux tunnels, mais entre la création du réseau RER dans les années 90 et la construction du deuxième tunnel, au moins 25 ans sont passés, durant laquelle une partie non négligeable des relations étaient terminus Zurich HB (une gare spécifiquement RER avait même été aménagée sur les emprises de l'ancien terminal postal)
Idem à Lucerne. Certes la S1 a été "diamétralisée" avec rebroussement, mais toutes les autres à voie normale sont terminus Lucerne.. Et cela fonctionne, même si ce n'est pas l'idéal, avec notamment un goulet d'étranglement à 3 voies en entrée de la gare de Lucerne (alors qu'à cet endroit convergent 5 lignes différentes), en attendant une gare souterraine d'ici peut-être 15-20 ans, allez savoir (de mémoire elle n'est pas incluse dans le projet d'aménagement 2030/2035).
Pour Marseille par exemple, Blancarde, moyennant peut-être une amélioration des connexions métro, pourrait devenir une gare RER majeure, aux cotés de St-Charles. Surtout s'il était possible d'envoyer les trains d'abord sur Blancarde puis St-Charles via des shunt, pour en faire un vrai noeud de correspondance entre les trains passe-saint-Charles (y compris TGV) et ceux s'y rendant.
De même inutile de commencer par vouloir des cadences au quart d'heure voir au dix-minutes. Le RER lausannois (qui doit toucher un bassin d'au moins un demi-million d'habitants) est encore aujourd'hui majoritairement cadencé à la demi-heure, voir à l'heure pour certaines lignes moins importantes (tout comme celui de Lucerne par exemple, ou de Bâle), après avoir commencé sur pas mal de lignes par un cadencement à l'heure, avec un passage progressif au quart d'heure d'abord sur la ligne LEB (qui peut être considérée comme faisant partie du RER même si pas numérotée en Sx) puis d'ici quelques années sur le tronçon central Cully - Cossonnay. Parce que cela prend du temps d'adapter les infrastructures, en tenant compte du trafic existant qu'il faut pouvoir maintenir au moins en partie.
Quant au matériel, les Régiolis sont loin d'être des bouzes, bien au contraire. Un Régiolis 6 caisses en mode électrique est aussi bien motorisé qu'un Z50000 à 8 caisses circulant sur le réseau parisien. Et de toute façon la limite concerne avant tout l'alimentation électrique, c'est d'ailleurs pour cela que les Regio2N sont "sous-motorisés". C'est de fait un point à travailler, mais c'est un point qui coûte cher et prend du temps. De plus les configurations à la ET 423 se heurtent à une réalité claire : la hauteur des quais standard en France est de 55 cm et ce n'est pas près de changer vu les implications que cela aurait sur le trafic plus longue distance.
Ce qui est sûr et certain, c'est que vouloir dès le départ (ou trop rapidement) un réseau aussi performant qu'un réseau suisse ou allemand qui a eu 20, 30 ans voir plus pour se développer, c'est la meilleure manière de faire du surplace, parce que les financements nécessaires seront gigantesques et difficilement trouvables et qu'en attendant on en reste dans la situation actuelle, ce qui ne peut qu'empirer les choses. Au départ la création des RER lausannois, fribourgeois, lucernois, etc. a d'abord été une opération de communication, avec notamment la mise en place d'une communauté tarifaire et la "renumérotation" de lignes anciennement "régionales" pour en faire un réseau RER, puis progressivement des améliorations (nouvelle halte, augmentation des cadences, etc.)
Voilà ce qu'il faudrait d'abord faire en France : avec les contraintes existantes (qui sont ce qu'elles sont), fiabiliser les dessertes, éviter les trous de desserte, mettre en place une communauté tarifaire, pas seulement avec les transports urbains du centre mais aussi des communes du bassin desservies par le RER, pour inciter les gens à se rendre dans les gares en transport public (réseaux de transports publics locaux qui doivent aussi être intégrés dans la communication du réseau RER, et converger vers les gares du "nouveau" RER), etc.
Et une fois cette première étape lancée, améliorer progressivement, sur 20 ans, 30 ans la chose, parce qu'on voit que la demande est là et justifie de tels travaux d'amélioration. Tout comme d'ailleurs le RER parisien ne s'est pas fait en un jour et continue à être développé (prolongement de la ligne E et Grand Paris Express qui est du domaine du "RER" plus que du métro urbain).
Et au niveau politique, il faut avoir une vraie vision à long terme, qui ne change pas tous les 5 ans, pour planifier des choses à 10, 15, 20 ans, parce que les projets d'infrastructures majeurs sont chers, prennent beaucoup de temps à être réalisés et ont des implication en cascade qu'il faut prévoir et planifier bien en avance...
Pour prendre un contre exemple frappant où on a tout voulu "révolutionner" d'un coup et ou on en paie encore les pots cassés : le réseau Léman Express. Avec l'ouverture du tronçon central, on a voulu "RERiser" le réseau de la Haute-Savoie. Sauf que cette RERisation a consisté à augmenter le nombre de train et réaliser toute une opération de communication sans vraiment :
1) regarder si l'infrastructure pouvait vraiment suivre (coté française elle est vraiment à la limite, et même le tronçon central pourtant neuf n'est pas exempt de défauts majeurs) ou plutôt ne pas vouloir considérer qu'elle serait à la limite...
2) offrir une vraie offre RER lisible et claire, sans trous de desserte, variantse de desserte, etc. notamment coté français...
3) faire quelque chose face à la gréviculture ambiante à Annemasse (genre accorder les primes à la vie chère demandées qui semblaient tout à fait justifiées pour le coup) qui a littéralement pourri la réputation du Léman Express dès sa mise en service, notamment coté suisse où il n'y a pas de culture de la grève, et qui a été aussi impacté (le tronçon central aurait du "théoriquement" pouvoir être exploité depuis Lausanne jusqu'à Annemasse même en temps de grève mais ne l'était pas dans les faits et aucune solution de repli fiable n'avait été imaginée à Chêne Bourg et aux Eaux-Vives, notamment pour les RegioExpress en provenance de Lausanne)
4) faire en sorte que les différences d'exploitation entre la Suisse et la France soient bien prises en compte dès le départ (c'est en partie lié à des problèmes d'homologation du matériel et... ...des grèves coté français qui ont empêché une vraie marche à blanc avant la mise en service officielle).
Au final la mise ne service du Léman Express a été désastreuse, et COVID obligeant la situation est de loin pas réglée. A vrai dire il faudra probablement des années, et/ou peut-être une remise en cause du schéma de desserte, pour que le réseau devienne vraiment fiable... ...et surtout pour corriger la réputation de manque de fiabilité qui s'est distillée dans la tête des gens, notamment coté suisse.