Tarifs SNCF - Mauvais signal prix pour la réforme ferroviaire
La réforme ferroviaire qui insiste sur le nécessaire effort financier - des acteurs ferroviaires, des voyageurs et des contribuables - pour résorber le déficit annuel de 1,5 milliard d'euros du rail, s'annonce délicate. Le récent exemple des tarifs du TGV Nord montre combien le politique risque de brouiller le message principal.A l’approche des municipales de 2014 et la crainte du gouvernement de voir s'enraciner le Front national en local, les usagers du train dans le Nord et le Pas-de-Calais sortent gagnants. Ils peuvent compter sur le poids et la position de certains de leurs élus, mais aussi visiblement sur le gouvernement, pour que la partie payée par l'usager dans le coût réel du train (via le prix du billet), reste contenue.
Le 21 mai 2013, le cabinet du ministre délégué aux Transports publie un communiqué dans lequel, à l’occasion des 20 ans du TGV Nord, "Frédéric Cuvillier et Martine Aubry demandent à la SNCF une adaptation de son offre TGV Nord". En fait, lors d’une réunion du 15 mai organisée sous l’égide du ministre Cuvillier, élu de Boulogne-sur-Mer (Nord), la maire de Lille a obtenu que la compagnie ferroviaire dirigée par Guillaume Pepy (son ancien directeur de cabinet lorsqu’elle était ministre du Travail), crée des tarifs très bas.
20 euros l'aller-retour entre Paris et le NordDepuis le week-end du 25 mai, il est ainsi possible d'aller à Lille, mais aussi à Boulogne, Calais, Valenciennes, Dunkerque, Valenciennes, Béthune, Arras ou Lens, pour un prix imbattable : "20 euros l’aller-retour entre Paris et toutes les destinations du Nord Pas de Calais", souligne le communiqué.
La nouvelle offre qui porte sur un quota restreint de places par rame, vaut pour la seule journée du samedi. Durant l’été, ce tarif très bas sera valable le dimanche.
L’avancée obtenue sur le TGV Nord constitue le point d’orgue de discussions menées depuis plusieurs années entre la SNCF et les élus nordistes, insiste le ministère. Et le communiqué de lister les acquis déjà arrachés : le nouveau forfait annuel lancé en janvier 2013, plus avantageux pour les navetteurs quotidiens du Paris-Lille ; le prix du billet Prem’s qui passe de 17 à 15 euros ou encore des TGV 100% Prem’s sur les Paris Lille via Arras du matin au soir.
Mais ce n’est pas tout, Frédéric Cuvillier, le ministre de tutelle et élu du littoral, attend de la SNCF des "propositions rapides pour réduire la durée des trajets en TGV de Calais vers Paris". Il demande aussi "à Eurostar d’étudier la réintroduction d’un arrêt à Calais dans les deux sens sur l’Eurostar Paris Londres".
Pas de jalouxBonne nouvelle, tous les autres voyageurs vont profiter de la brèche tarifaire ouverte dans le Nord. Pour ne pas faire de jaloux, la compagnie ferroviaire - par ailleurs confrontée à une baisse de son trafic depuis le début 2013 - va en effet étendre à partir du 22 juin le principe de l’aller-retour à prix réduit le samedi.
Un quota de places à 30 euros sera réservé sur pas moins de 150 destinations situées entre une et deux heures de TGV et de trains Intercité de Paris. Exemple : Paris-Reims, Paris-Rennes, Paris-Tours, mais aussi Lyon-Marseille.
L’arrivée inopinée de ces nouveaux tarifs à 20 euros ou 30 euros arrive au moment où la SNCF s’est livrée le 21 mai, via Barbara Dalibard, directrice générale déléguée de Voyages SNCF, à un exercice de pédagogie sans précédent auprès des journalistes. Dans le but de montrer que le TGV n’est pas si cher qu’on le pense. Et que la gamme de tarif est simple. Vous trouvez ?
Comment la SNCF fait ses prix 2,1 fois le barème kilométrique des TER : c’est cette formule réglementaire que la SNCF applique pour fixer chaque année le plafond maximal des hausses de prix de ses TGV (+ 2,3% en 2013) validées par l’Etat.
Mais par rapport au plein tarif Loisirs, la compagnie ferroviaire est tenue de pratiquer un volume minimum de prix bas, la moitié devant être inférieur au tarif réglementé. Par ailleurs, l’augmentation des tarifs sociaux ne peut dépasser 1,4 fois le barème kilométrique.
Au final, la SNCF indique que dans son offre Loisirs, seuls 17% des places proposées le sont au tarif plein pot. Admettant par ailleurs que la demande peut faire monter les prix de façon exceptionnelle et contenue.
Exemple donné, celui d’un grand week-end de chassé-croisé vers les stations de sport d'hiver, en mars. En moyenne, le prix des billets augmentent de 15% : 57 euros contre 50 euros en temps normal. Le transporteur admet aussi que le prix du trajet court est proportionnellement plus élevé que celui d’un trajet de plus d’une heure. D’où l’effort fait sur le TGV Nord.