Bonsoir,
J'ai beaucoup de documentation sur les transports urbains d'Angers, avec des plans et des horaires. Mais ils sont sur des disques durs auxquels je ne peux plus accéder depuis longtemps car ma station d'accueil est hors service, il faut que j'en achète une nouvelle. Bien sûr j'ai toujours les originaux, mais il faudrait les retrouver et c'est un gros travail pour tout scanner, ce que je n'exclus pas. J'ai également de vieux guides horaires (des indicateurs Alpha) de 1961, 1962 et 1964, enfin quelque chose comme ça, mais c'est dans mon foutoir.
Pour l'instant tu vas déjà pouvoir ressentir un grand bonheur en consultant la revue
ANGERS NOTRE VILLE (publication municipale) : le numéro
SPÉCIAL BUS d'octobre 1972 consacré à la Studa (Société des transports urbains d'Angers) est consultable à cette adresse :
https://docplayer.fr/131988728-Ville-andegavvm-angers-octobre-c-p-rc-h1-vf-mairie-d-angers.html. On ne peut pas l'enregistrer, sauf en html, ce qui n'apporte pas grand-chose, mais tu peux faire des copies d'écran.
Ce numéro correspondait au lancement en 1972 de la ligne Étoile (1-Belle-Beille, 2-Monplaisir, 3-Roseraie, via le Ralliement). Elle fut la première ligne correctement desservie à Angers, elle a permis de changer d'époque. Mais c'était aussi
la seule ligne très bien desservie du réseau. Le reste était dans un état d'une très grande médiocrité. Ainsi, l'année précédente (1971) il y avait seulement 49 bus, qui avaient parcouru 1 400 000 km et transporté 6 000 000 de voyageurs. Dans cette revue on voit la hiérarchie des lignes selon le nombre de voyageurs.
Il faut souligner qu'à l'époque, mais je ne sais pas précisément jusqu'à quand, c'étaient les seuls contribuables d'Angers qui participaient au financement du réseau, depuis que la concession des TEA, aux risques et périls de l'exploitant, souffrait d'un déficit chronique. Trélazé, Les Ponts-de-Cé et Mûrs-Érigné ne payaient pas un sou. Les autres communes n'étaient pas desservies, sauf Avrillé et Montreuil-Belfroy par Démas qui était aux risques et périls mais sans aucune aide.
Cette année 1972 fut très importante car elle initia la transition entre un réseau complètement sous-développé (un des pires de France avec Caen et Nîmes) et un réseau amélioré bien que bourré de graves défauts. La Studa a été un drôle d'exploitant, bricoleur, amateur même, mais elle a tout de même impulsé des améliorations sur ce réseau hérité de la Compagnie des tramways électriques d'Angers (TEA), laquelle avait installé le réseau de tramways en 1896 et l'avait converti en réseau de bus (dernier tram le 30 avril 1949, sauf erreur de jour, sur la ligne T, Ralliement — Trélazé). La concession des TEA, d'une durée de 75 ans, courut de 1895 à 1970. Ensuite la convention entre la Ville d'Angers et la Studa fut signée le 3 juin 1970.
Le nouveau réseau (la Studa) fut dirigé par l'ancien et dernier dirigeant local de l'ancien réseau (les TEA, ou la CTA ? ou la SAA ?). Mais à l'époque des TEA l'exploitation était toutefois supervisée par la
COE, Compagnie de l'Ouest-Électrique dont le siège était au réseau du Mans, réseau où avait auparavant servi ce dirigeant. La COE supervisait aussi le réseau de Rennes (TUR), pourtant Angers n'appartenait pas à la COE mais au groupe
Les Exploitations électriques, groupe que je suppose lyonnais et devenu Transexel, puis VIA GTI, puis Keolis (mais ma supposition est un peu floue). Je crois que la COE gérait le réseau des TEA d'Angers, sans le posséder, tandis qu'elle était propriétaire des réseaux du Mans (lequel était simplement nommé COE) et de Rennes (les TUR). Avant la création de la Studa cette même personne dirigea aussi la CTA (Compagnie des Transports d'Angers), puis la SAA (Société des autobus angevins), deux sociétés dont je n'ai jamais compris l'utilité car elles se situaient, sauf erreur, à la fin de la concession des TEA, mais cette concession était normalement encore en cours. Il devait y avoir un truc…
[Édition] Précision importante : il n'y avait aucun lien entre l'ancienne Compagnie des tramways (TEA) et la nouvelle Studa, et pas davantage entre la Compagnie de l'Ouest-Électrique et la Studa. J'ai toujours trouvé que l'appellation
Ouest-Électrique était un beau nom, il faisait penser à l'
Électrique-Lille-Roubaix-Tourcoing (ELRT) et aussi à
Pacific-Eletric (les tramways rouges de Los Angeles).
[Fin]Soit dit en passant, le réseau du Mans était bien meilleur que celui d'Angers, et celui de Rennes l'était aussi, mais dans une moindre mesure. À Angers on était situé dans la fin du classement quant à la qualité du réseau urbain, auquel les édiles ne s'étaient guère intéressés jusque là. Mais à partir de 1972 les choses évoluèrent.
La 10 juillet 1979 le contrat d'affermage avec la Studa fut rompu d'autorité par le SMTUAA (Syndicat mixte des transports urbains de l'agglomération d'Angers) qui lui substitua la Cotra (Keolis) (*). La cause de la rupture était la restructuration du réseau en 1979, qui fut un échec lamentable :
[Édition] de gros moyens furent mis en œuvre (dont des achats de bus et des embauches), ils étaient bien proportionnés par rapport à un réseau de la taille d'Angers, sans excès, mais la clientèle ne suivit pas car elle ne pouvait plus aller commodément où elle souhaitait ; l'ossature du réseau était inepte.
[fin de l'édition] Toutefois la Studa ne fut pas la seule responsable de l'étude et de la mise en place de ce nouveau réseau, complètement absurde : municipalités, syndicat mixte et agence d'urbanisme eurent aussi leur part. Complètement hors-norme, ce réseau était unique dans son genre. en France, mais c'était en mal : il dédaignait le centre-ville (**) et organisait des sous-réseaux ayant pour tête de ligne le Mail, la Gare Saint-Laud, la place Monprofit. Le Ralliement ne voyait plus guère passer que la ligne Étoile et sans doute aussi deux autres lignes
[Édition] dont une très faible (Roc-Épine, Parc de La Haye), l'autre étant probablement la S, Bois-du-Roy — d'Arbrisseau, mais c'est à vérifier
[fin de l'édition]. De son côté le réseau spécifique des zones industrielles fut aussi un échec, ne transportant guère de monde dans ses minables petits bus SG5 Cheyenne (Saviem-Heuliez), des camions à voyageurs.
Comme tout ce réseau était éclaté, la ligne O, circulaire (nommée Petite ceinture), faisait le tour des boulevards centraux, ramassant les correspondances des voyageurs qui, faisant auparavant des trajets directs, se trouvaient alors obligés de perdre du temps avec une correspondance pour le centre-ville. Cette ligne O coûtait particulièrement cher en exploitation car elle était très modérément fréquentée, surtout sur le tronçon Gare Saint-Laud — Château — Monprofit où il n'y avait en général que quelques personnes.
Cette ligne O a montré que si la correspondance est une bonne chose quand elle permet un complément de trajet, en revanche c'en est une très mauvaise quand elle est obligée et ne fait que compliquer le trajet sans offrir le moindre avantage, lorsqu'un trajet direct est remplacé par un trajet en deux tronçons.
La ligne Étoile fonctionnait avec une fréquence de 8 minutes entre 7 h 00 et 19 h 40. Les premiers départs étaient vers 5 h 40-6 h 00, les derniers départs du Ralliement avaient lieu à 22 h 15. C'était l'amorce d'un certain service de soirée.
Sur leș autres lignes les derniers départs du centre avaient lieu, selon la ligne, de 19 h 05 à 19 h 45, avec une prépondérance pour 19 h 30. À Certaines heures les lignes P (Les Plaines) et T (Trélazé) se confondaient : un même bus partant du Ralliement allait aux Justices, puis aux Plaines, puis revenait sur la ligne T jusqu'à"à Trélazé via La Pyramide. Je suis presque sûr qu'à 19 h 30 (dernier départ) il faisait même un crochet supplémentaire via Saint-Léonard à partir des Justices (via la rue Jean Jaurès) avant de redescendre la rue de Ballée vers Les Plaines. C'était le tortillard des tortillards.
Quelques années avant la ligne Étoile un essai de dernier départ tardif avait été essayé sur Belle-Beille, à 21 h 30. Mais c'est flou dans mon souvenir, il faudrait retrouver l'entrefilet du Courrier de l'Ouest qui l'avait annoncé.
Dans cette revue « Spécial bus » on trouve des documents très intéressants :
— le plan du réseau, en noir et blanc ;
— les horaires de toutes les lignes, sauf, malheureusement, la ligne E (Ralliement – Ponts-de-Cé – Érigné) ;
— les tarifs ;
— des photos de SC10 ;
— quelques statistiques.
Les horaires montrés dans la revue montrent la grande misère du réseau angevin, hormis la ligne Étoile. En dehors de cette ligne principale les autres lignes n'avaient guère de fréquence (de 20 à 40 minutes) et il y avait des lignes intermittentes proposant peu de passages (10 à 12 par jour). Il n'y avait que 35 bus/jour sur la ligne T (Trélazé) et 26 sur la ligne P (Les Plaines), et encore elles ne totalisaient pas 61 passages/jour à elles deux puisque 16 bus utilisaient un itinéraire combiné, mixant les lignes P et T. Malheureusement on n'a pas ceux de la ligne E d'Érigné, mais ils étaient plus faibles que ceux de la ligne T de Trélazé, je les supposerais sans doute assez proches de ceux de la ligne P (Les Plaines).
Mais, tout de même, à Angers on commençait en 1972 à sortir, à tout petits pas et sans se presser, de la période noire des transports urbains, qui s'étendit en France de 1944 à environ 1970 et sans doute un peu plus tard. À vrai dire, dès 1925 et le développement de la bagnole ça avait commencé à aller mal et vers 1935 bien des trams avaient laissé la place à de petits bus à capot, ce fut le cas à Angers. Mais en 1965 l'arrivée des bus standards Saviem SC10 et Berliet PCM avait déjà fait beaucoup de bien en France, sauf aux trolleybus…
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(*) Voir le compte-rendu du Conseil d'état pour le procès entre la Studa et le Syndicat mixte pour les transports urbains de l'agglomération angevine (SMTUAA) :
https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007749241(**) Cet abandon du centre-ville qui fut fatal à la Studa me fait craindre pour la future ligne B du tramway (Belle-Beille — Molière — Monplaisir). Elle aussi va fuir le centre-ville car cette place Molière, entourée de vastes zones vides (la Maine, la voie des berges, des parkings), n'est qu'une porte d'accès au centre-ville, mais elle n'est sûrement pas l'hyper-centre. Souvent les mêmes causes produisent les mêmes effets, aussi j'ai une certaine appréhension pour l'avenir de cette ligne B. Mais comme on n'a pas installé d'aiguillages triples à Molière, à Mendès-France, à Foch-Maison-Bleue, il sera très difficile d'adapter le réseau ou de le faire évoluer.