Paris débat de l'avenir de la Petite Ceinture
A l'abandon depuis 1993, la Petite Ceinture, cette ligne de chemin de fer qui fait le tour de Paris, se cherche un nouveau souffle. La mairie rêve d'en faire un lieu d'agrément et de promenade, mais certains syndicats et associations militent pour une réouverture ferroviaire. La concertation publique s'est achevée le 14 février 2013 et une convention doit être signée avec Réseau ferré de France d'ici à l'été.Quasiment à l'abandon, la ligne de la Petite Ceinture compte 32 kilomètres de voies ferrées dont 23 sont aujourd'hui désaffectés.
Construite à la fin du 19e siècle pour relier les grandes gares parisiennes, elle n'est plus utilisée pour le transport de voyageurs depuis 1934, et depuis 1993 pour le transport de marchandises. La nature y a peu à peu repris ses droits, parfois, c'est même la forêt vierge, et le lieu est aujourd'hui considéré comme un havre de biodiversité en plein Paris.
Plutôt que de la laisser encore végéter, la mairie de Paris planche actuellement sur son avenir et a lancé une concertation en décembre 2012. Elle s'est achevée le 14 février 2013.
Une "coulée verte" pour ParisLe maire Bertrand Delanoë et son équipe voudraient créer une grande "coulée verte", un peu sur le modèle de la High Line de New-York (une ancienne ligne de fret dans le sud de Manhattan), sur au moins une partie de l'ancienne voie ferrée. L'atelier parisien de l'urbanisme (Apur), propose de diviser la ligne en trois secteurs :
- Au Nord, la Petite Ceinture garderait son rôle ferroviaire pour permettre des transferts de trains entre la gare de l'Est, la gare du Nord et la branche nord-ouest du RER C.
- A l'Est, dans les 19e et 20e arrondissements, des aménagements "réversibles" seraient possibles, en conservant la possibilité de faire circuler un tramway (l'Apur évoque un possible prolongement de la ligne de tramway T8, actuellement en construction en banlieue nord, mais sans fixer de calendrier ni de budget).
- Au Sud, la voie ferrée serait supprimée pour être remplacée par une promenade ou une piste cyclable. Les anciennes gares pourraient servir de locaux associatifs.
Le rail sinon rienMais tout le monde ne l'entend pas de cette oreille. Pour de nombreux participants aux débats, associations et syndicats, la Petite Ceinture doit garder son caractère ferroviaire. Il faudrait même y refaire circuler des trains.
"Les transports parisiens sont au bord de l'asphyxie. Or la Petite Ceinture ferroviaire est une infrastructure unique en Europe […] qui peut répondre aux besoins de transports de voyageurs et marchandises", explique ainsi la CGT. "Alors que l'usage des transports en commun ne cesse d'augmenter, ce serait vraiment dommage de mettre à la poubelle 30 kilomètres de voies ferrées en plein cœur de Paris", s'inquiète également un membre de l'association pour la sauvegarde de la petite ceinture.
"Si on ferme la voie ferrée, l'unique moyen de faire rentrer des marchandises dans Paris sera la route", note un habitant, bien qu'il existe également du transport fluvial sur la Seine.
Le retour des trains ? Hors de question pour certains riverains. Depuis l'arrêt du trafic, certaines habitations se sont bâties au bord de l'emprise ferroviaire, parfois à moins de deux mètres des voies. "Lorsque j'ai acheté mon logement qui donne sur la petite ceinture, on m'a vanté la tranquillité des lieux", s'agace une habitante du 12e arrondissement.
Les jeux sont faits ?Mais pour certains, le débat est tranché d'avance. Le groupe écologiste au Conseil de Paris dénonce une concertation "expéditive" : "On a l'impression d'une fuite en avant pour sortir avant mars 2014 (date des prochaines municipale, ndlr) un projet plus électoraliste que sérieux", dénonce Yves Contassot, conseiller de Paris.
D'autres participants aux différents débats déplorent le manque de données objectives, notamment en matière de coûts. "Tant qu'on aura pas de données chiffrées, on restera dans la subjectivité totale", juge un habitant du 15e arrondissement.
Il faut dire que la Ville de Paris n'entretient pas le suspens. "La possibilité du retour à l'usage ferroviaire a été écartée en 2001 lors du débat sur l'implantation du tramway T3", tranche Anne Hildago, première adjointe de Delanoë et candidate à sa succession.
La Ville de Paris va maintenant engager les négociations avec Réseau ferré de France (RFF), propriétaire des voies, en vue de la signature d'une nouvelle convention d'utilisation de l'infrastructure d'ici à l'été 2013. Et éventuellement, de l'acquisition par la municipalité de la partie de l'emprise destinée à devenir une promenade. Reste à en négocier le prix.