Quand l’usine est sur les rails
ligne pau-dax Depuis le 7 janvier et jusqu’en mars 2014, Réseau ferré de France (RFF) procède au renouvellement des deux voies de la ligne ferroviaire. Au total, 500 personnes sont mobilisées pour ce chantier. Chaque nuit, une véritable usine sur rail se met en activitéMinuit, entre Orthez et Puyoô, une lumière jaillit et un train siffle, tranchant le calme de la nuit. Sur cette ligne qui relie Pau à Dax, il n’y a pourtant ni voyageurs ni convois de fret. Depuis 22 heures, la circulation est totalement interrompue et pas moins de 450 travailleurs ont investi les lieux.
Jusqu’à 6 heures, ces hommes, qu’ils soient ouvriers, ingénieurs ou chef d’équipe seront à pied d’œuvre pour renouveler entièrement la voie n° 1.
Posée dans les années 1950 à 1960, cette dame de fer, de pierre et de béton arrivait en bout de course, à bout de souffle. En fin de vie. Chaque nuit, depuis le 7 janvier, un train usine prend donc place sur les rails pour lui redonner vie. Au total, 67 kilomètres de voies seront traités entre le Béarn et les Landes.
Après des débuts un peu difficiles au départ de Pau, le chantier a maintenant atteint sa vitesse de croisière. L’entreprise Transalp et ses 250 ouvriers venus d’Italie travaillent aux côtés de 200 agents SNCF, mandatés pour la maîtrise d’ouvrage par Réseau ferré de France (RFF).
Une fonderie sur placeCette nuit-là, l’impressionnant engin s’étale sur 500 mètres. Au rythme de 1 000 mètres par nuit, il substitue les anciennes traverses et les vieux rails par de nouveaux éléments.
À côté, derrière, voire même à l’intérieur de cette usine sur rails, les hommes, tous casqués et vêtus de tenues orange criard, effectuent leur tâche avec une précision et une attention de tous les instants.
Il faut mesurer l’écart entre les rails, s’assurer de la fixation des traverses et même souder les immenses travées d’acier entre elles. Le métal est fondu et travaillé directement sur place. Qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il gèle, les mêmes opérations se répètent.
Parfois, le convoi est stoppé parce qu’une traverse en bois a provoqué l’équivalent d’un bourrage papier dans une imprimante. Le travail à la chaîne, de nuit et en plein air.
Bruit et passages à niveauPour rendre cette deuxième phase d’opération possible, un autre train est passé deux jours plus tôt pour enlever le ballast usager. C’est la phase du dégarnissage. Et sur la zone du chantier, tous les passages à niveau ont dû être fermés. « Lorsqu’on ôte le ballast, la voie s’abaisse de 20 centimètres, il est donc impossible de rouler », explique Jean-Philippe Charlot, qui pilote les opérations pour la SNCF.
Avec le bruit, c’est la deuxième contrainte que doivent affronter les riverains. « Nous recevons des courriers, indique-t-on chez RFF. Il y a le bruit du chantier et des ouvriers quand ils repartent mais cela reste plutôt marginal, même si nous faisons remonter. »
La phase 1 bientôt finieEn moyenne, pour effectuer les huit opérations nécessaires au renouvellement complet de la voie, les impressionnants engins restent entre dix et vingt jours sur une zone. Car il faut aussi relever et stabiliser les voies. « Dans les dernières étapes, il faut libérer les contraintes du rail dues à la contraction-dilatation du métal », décrypte Jean-Philippe Charlot.
Le nivellement complémentaire viendra ensuite parachever les travaux. Puis avant de clore définitivement le chantier, il faudra tout nettoyer.
Le renouvellement de la voie n° 1 sera effectif le 30 avril prochain, rendant la tranquillité aux nuits des riverains.
Les usagers veulent plus de trainsLa visite du chantier, dans la nuit de lundi à mardi, s’est déroulée en présence des représentants aquitains de l’Association des usagers du train.
L’un d’entre eux a regretté que ces travaux ne soient pas mis à profit pour augmenter la vitesse de circulation à 160 km/h. « Il y a d’autres contraintes que celles qui sont liées au tracé, comme les passages à niveau », a expliqué Pascal Petel, le directeur adjoint de Réseau ferré de France Aquitaine-Poitou Charente.
Au quotidien, depuis plusieurs mois, les usagers de la ligne 65 qui relie Pau à Bayonne vivent la « galère ». « Quelle ne fut pas ma surprise, le lundi 18 mars, de constater que l’intercité de 18h03 avait tout simplement été supprimé pour cause de travaux sur les voies. La solution proposée était de prendre le TGV de 18h27 qui passait par Dax et me faisait arriver à 19h36 à Orthez », témoignait récemment une Orthézienne. Le chantier entraîne une augmentation de 12 minutes du temps de trajet habituel. Mais ce sont les changements d’horaires fréquents qui perturbent le plus les usagers. Beaucoup estiment qu’il est de plus en plus difficile de concilier le train avec une vie professionnelle et personnelle.
« On peut s’adapter au fait qu’il y a un an de travaux, souligne Marie-Hélène Henry, qui utilise le train tous les jours. Mais nous n’avons aucune perspective intéressante derrière. La Région ne mise que sur la LGV et la ligne Pau-Canfranc. Nous, qu’il y ait le cadencement ou non, ce que nous voulons, ce sont des trains ! »
160C’est, en millions d’euros, le coût total du chantier sur l’axe Pau-Dax. Il est entièrement financé par Réseau ferré de France.
128C’est le nombre de kilomètres de voies qui sont renouvelées au cours de cette opération.
222000C’est le nombre de nouvelles traverses en béton qui seront posées au total.
30 avrilC’est la date à laquelle se terminera la première phase du chantier. La seconde, qui concernera la voie 2, se déroulera d’octobre 2013 à mars 2014.
12C’est, en minutes, l’allongement de la durée du trajet entre Pau et Dax durant le chantier.
0L’augmentation de la vitesse sera nulle après les travaux. Ce renouvellement total assurera toutefois un « meilleur confort » aux usagers qui rouleront à 140 km/h comme aujourd’hui.
25C’est, en centimètres, la hauteur du ballast qui est réintroduit sur les voies.
400C’est, en mètres, la longueur d’un rail neuf. Au total, 260 km seront posés durant les travaux.
1950-60La voie ferrée reliant Pau à Dax date de ces années-là.