L'Est Républicain, le 13 juillet 09 Wrote:Transports
La déroute des trolleys fantômesSept ans que les « Ansaldo », aux perches trop courtes, croupissent au dépôt. En contentieux avec l'industriel, le Grand Nancy a marqué des points décisifs. Idem pour les bus au gaz...
Entre les pneus et les passages de roues, les araignées ont tranquillement tissé leurs toiles ! Les intérieurs, dont la conception paraît aujourd'hui dépassée, sentent le renfermé. La poussière s'accumule sur les engins. Et encore : un décrassage effectué il y a quelques mois a évité que la scène ne tourne à la fois au repoussant et au ridicule.
Etroitement surveillés (ils sont un enjeu financier), placés à l'abri des regards, les sept véhicules s'étirent en file indienne dans l'ombre du dépôt de Nancy-Jarville.
Ce sont autant de silhouettes encombrantes qui semblent bien loin du lustre et de la modernité qui, il y a 8 ans, étaient censés accompagner leur lancement.
Ces silhouettes, ce sont celles des trolleybus de l'industriel italien Ansaldo.
Commandés en 98, ils devaient être livrés en 2000 pour une mise en service sur la ligne Beauregard. Dont les usagers ne se plaignent finalement pas d'avoir hérité, au bout du compte, de Citaro Mercedes avec clim.
Pour cause : dans la foulée des péripéties du tram canadien Bombardier, les Ansaldo italiens avaient, eux aussi, défrayé la chronique. Avec un enchaînement d'épisodes digne d'un effeuillage d'artichaut.
A croire que les transports de Nancy avaient la poisse.
Dans les viragesNon seulement ces véhicules ont été livrés en retard (premiers exemplaires en 2002), mais ils ont ensuite révélé un freinage inadapté aux règles françaises et, incroyable, des perches trop courtes pour le réseau filaire électrique de Nancy. Résultat : des déperchages dans les virages ! Gênant...
On a bien essayé de trouver des solutions (allongement, modification du système de levage des perches). Mais l'histoire a tourné au vinaigre avec l'industriel quand le Grand Nancy a réclamé les pénalités de retard de livraison prévue au contrat. Côté transalpin, on a alors plutôt traîné des pieds pour arranger la situation. A tel point que la Communauté a même, en 2003, lancé un appel d'offres inattendu pour tenter de faire elle-même des modifications.
Mais, en 2004, après une expertise du matériel, elle décidait d'en finir en votant une délibération annulant purement et simplement le marché de 4,3 M €.
Ansaldo a contre-attaqué devant le tribunal administratif pour faire invalider cette décision. C'est le Grand Nancy qui vient de remporter la manche, les juges « estimant que nous étions effectivement fondés à annuler ce marché », explique Christian Parra, vice-président à la politique transport.
Gros sousLe groupe italien devrait donc en principe venir reprendre 6 des 7 trolleybus. Un des véhicules ayant été réceptionné, il n'est pas concerné par la décision. Reste au Grand Nancy à récupérer la mise. 1,6 M € avait déjà été versé. En théorie, c'est 1 M € qui devrait revenir dans les caisses. Mais la collectivité n'entend pas en rester là. Sans même parler des pénalités de retard, elle veut appliquer des frais de gardiennage à Ansaldo (7 ans !) et une astreinte journalière pour l'inciter à débarrasser les lieux. De quoi faire dire à Christian Parra : « Dans cette affaire, comme dans celles de Bombardier et d'Heuliez (NDLR : ci-dessous), nous avons eu des problèmes. Nous les avons gérés. Mais au final et à chaque fois, les vraies responsabilités ont été établies : nous avions raison. Et nous avons fait ce qu'il fallait pour préserver les intérêts de la collectivité et des contribuables ». Reste à savoir si le feuilleton Ansaldo est réellement terminé. Pas de recours de l'Italien aux dernières nouvelles...
Livrés en retard, non conformes aux attentes, les trolleybus italiens « végètent » depuis sept ans dans le dépôt de Jarville. Vont-ils repartir en Italie ?Ghislain UTARD